Durant le mois de mai, il y a eu beaucoup d’initiatives afin de célébrer le 9e art. Même si je ne suis pas une grande lectrice de bandes-dessinées, j’apprécie découvrir ce genre, puisque je tombe régulièrement sur des pépites!
J’ai eu envie de profiter du mois de mai pour me lancer à fond dans la thématique. Prochainement, je publierai un article rassemblant mes avis sur toutes les bandes-dessinées que j’aurai lues pendant le mois de mai. Aujourd’hui, cependant, je propose un avant-goût avec trois avis sur des bandes-dessinées lues dans la dernière année et dont je n’ai encore jamais parlé ici. C’est parti!

La grosse laide, Marie-Noëlle Hébert
Dans cette autobiographie, Marie-Noëlle Hébert met en mots et en images la relation trouble qu’elle entretien avec son corps depuis son tout jeune âge. Le regard des autres sur elle la brûle. Les mots de sa famille la blessent. La pression de maigrir, de correspondre aux modèles de beauté, de devenir quelqu’un qu’elle n’est pas, vient de tous les côtés, même d’elle-même. Des fragments de souvenirs douloureux parcourent les pages de ce roman graphique pour tenter de remonter à l’origine de sa souffrance, pour montrer que les blessures sont encore vives, même une fois adulte. Comment s’en libérer quand elles ont dominé toute sa vie?
Cette BD est une œuvre d’art. Les illustrations sont sublimes et tellement pleines de sens. Certaines d’entre elles sont tellement détaillées qu’on aurait dit des photographies en noir et blanc. D’autres plus floues donnent bien l’impression que les images sont en mouvements ou encore que ce sont des morceaux de souvenirs un peu plus effacés de la mémoire de l’auteure. Et que dire de ces souvenirs!? On ne peut qu’avoir de l’empathie pour cette jeune fille qui grandit dans ce monde si superficiel qui rejette les personnes différentes de la norme. Cette jeune fille, c’est aussi un peu moi et toutes les autres. Les mots ont percuté mon cœur et s’y sont réfugiés. J’ai tant ressenti de la haine, de la tristesse, du désespoir, mais aussi le désir d’être libre, d’aller mieux, de s’aimer… de m’aimer. Vraiment, cette bande-dessinée a été un gros coup de cœur pour moi.
Ma note (/5)
Pyongyang, Guy Delisle
Guy Delisle raconte dans cette bande-dessinée son expérience dans la capitale du pays le plus fermé au monde. Superviseur d’animation dans le domaine du dessin animé, il part travailler deux mois à Pyongyang, séjour pendant lequel il partagera son temps entre un hôtel pratiquement inoccupé, son lieu de travail et ses visites touristiques. Toujours accompagné de son guide nord-coréen, il ne peut rien faire seul. Et c’est là qu’une règle à suivre parmi une foule d’autres.
J’ai aimé en apprendre plus sur Pyongyang et vivre l’expérience touriste à travers les pages de cette BD. Je m’imaginais bien l’immensité des bâtiments et des statues grâce à l’indéniable talent de dessinateur de Guy Delisle. Les illustrations en noir et blanc à saveur caricaturale comme dans les dessins animés sont très réussies. Toutefois, j’ai trouvé certains propos assez déplacés. C’est une chose d’être contre le régime, s’en est une autre de rire des gens qui le subissent ou de les juger. L’auteur s’amuse régulièrement de leur façon d’être (soit ils sont trop joyeux, soit ils sont trop sérieux à son goût) et se moque de leurs manies ainsi que de leur façon de respecter les règles à la lettre sans les questionner. J’ai aussi été saisie par des commentaires et des allusions sexistes envers les femmes, comme des décolletés et des courbes cachées sous des vêtements pas assez révélateurs à son goût (peut-être que ce voyage lui aura appris à regarder les femmes dans les yeux…). Il y a même une case que j’ai trouvé vraiment déplacée (à la limite de la culture du viol) qui semble avoir été modifiée dans certaines éditions dans le monde, mais pas dans celle que je possède, malheureusement (pour en savoir plus sur cette fameuse case, lire cette critique et ses commentaires sur Goodreads). À quand cet ajustement au Québec? Bref, ce n’était pas une mauvaise lecture, mais je suis déçue. Ça aurait pu être vraiment mieux.
Ma note (/5)
Maus, Art Spiegelman
Dans ce roman graphique, on suit deux histoires à deux époques. D’une part, dans les années 70, on assiste à la quête de Art Spiegelman qui consiste à retracer les souvenirs de son père datant de l’époque de la Seconde Guerre mondiale. D’autre part, on découvre l’histoire de ce dernier qui a survécu à l’Holocauste, le génocide du peuple juif d’Europe. À travers des entretiens enregistrés, Vladek Spiegelman raconte sa vie en Pologne à partir de la fin des années 30, période durant laquelle il épouse sa femme Anja et accueille dans le monde son premier fils, Richieu. On voit alors le régime de terreur s’installer et la façon dont le jeune couple se débrouille pour rester en vie et éviter les camps de la mort; mais ce qui devait arriver arriva…
J’ai beaucoup lu à propos de la Seconde Guerre mondiale, mais cette BD se démarque par son originalité sur plusieurs aspects. D’abord, je ne peux passer outre l’aspect du choix de représenter les différents peuples par des animaux. On peut le lire à abondance dans les avis qui ont été fait sur ce livre, mais c’est vrai qu’il s’agit d’un procédé qui aide à faire passer des choses difficiles de façon plus légère. On peut prendre un pas de recule et observer le ridicule de la situation. Ensuite, ce que j’ai aimé par-dessus tout, c’est la façon dont l’auteur choisi de dépeindre son père comme étant un être humain complexe, avec un caractère impossible, des principes solides et des habitudes qui lui tiennent à cœur, mais qui peuvent tombent sur les nerfs des autres. Comme c’est mentionné dans le livre, on a tendance à admirer les personnes qui ont survécu à cette tragédie. Cependant, il ne faut pas oublier que ce ne sont pas que les meilleures personnes qui ont survécu. C’était du hasard, un concours de circonstances et beaucoup de chance. Le père de Art s’en est sorti avec des traumatismes qui l’ont forgé. Par exemple, Art le montre comme une personne très avare, ce que l’on peut comprendre si on a déjà manqué de quoi que ce soit dans la vie. Par contre, être victime d’antisémitisme ne lui a pas appris à être plus ouvert et tolérant envers les gens différents de lui. Tour à tour, on développe de l’empathie pour le père face à son passé, puis pour le fils par rapport à sa relation tumultueuse avec lui. J’ai tout aimé de ce roman graphique que je recommande avec grand empressement!
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