N’essuie jamais de larmes sans gants – Jonas Gardell

Je souhaitais lire ce roman depuis longtemps, mais je dois avouer que je le regardais avec un peu d’appréhension. D’abord, c’est un pavé de près de 830 pages. Je voulais trouver le moment parfait pour le lire, une période où ma motivation serait à son meilleur. Ensuite, juste avec le titre, la couverture et le résumé, je savais que ça allait être dur. J’avais besoin d’être prête psychologiquement avant de me lancer. Je crois que j’ai bien fait. J’ai pu lire tranquillement et savourer ce roman qui n’est rien de moins qu’un monument. Coup de cœur garanti.

 

N'essuie jamais de larmes sans gants, GARDELL, JONAS © ALTO 2018
N’essuie jamais de larmes sans gants, GARDELL, JONAS © ALTO 2018

L’HISTOIRE EN BREF

Retour dans la Suède des années 1980 où la libération sexuelle bat son plein. L’homosexualité, qui était toujours considérée comme un crime en 1979, se vit encore dans les recoins sombres des ruelles, des buissons et des appartements miteux. Rasmus, enfin adulte, déménage dans la grande ville de Stockholm où il naît enfin. Plein d’espoir en l’avenir, il se met à vivre la vie qu’il a tant attendu dans sa campagne natale où il était impossible d’être lui-même et rencontre des amis comme lui. Benjamin, lui, refoule ses désirs en s’investissant corps et âme dans sa congrégation de Témoins de Jéhovah dont sa famille fait partie depuis toujours. Ses croyances profondément ancrées seront bouleversées à la seule vue de Rasmus par une nuit de Noël chez Paul, ange gardien des gais égarés. Les amoureux vivront dès lors leur amour comme ils le peuvent, malgré l’adversité et malgré cette nouvelle maladie, la faucheuse qui ne prend que les homosexuels, qui les guette, eux et leurs amis.

MON AVIS EN QUELQUES POINTS

  • Il s’agit d’un roman mémorable sous bien des facettes. D’abord, la diversité de personnages et leur vécu enrichit l’histoire. L’auteur accorde une attention particulière à chacun de ses personnages et aux relations qu’ils développent entre eux, ce qui rend le récit tellement humain! Par ailleurs, le cœur du roman n’est pas le sida (ou la sexualité!) même s’il est le vilain de l’histoire. Non, le cœur du roman, c’est l’amour et l’amitié contre l’adversité.
  • Ensuite, j’ai beaucoup aimé que le déroulement de l’histoire soit entrecoupé de chapitres plus informatifs. L’auteur y mentionne des événements historiques et y parsème des citations de personnalités suédoises et américaines publiques de l’époque. Ça rend tout ça encore plus réel, plus palpable. Ça donne froid dans le dos, car cette époque, cette intolérance, n’est pas si lointaine. Et le sida est encore d’actualité.
  • Puis, la plume franche de l’auteur m’a plu. C’est une plume instable. Cynique et dénonciatrice par moment, à la limite du vulgaire parfois, mais la plupart du temps, c’est une plume touchante et sereine. Toutefois, même si traduction française l’oblige, quelques mots, tels que l’insulte « pédés » parfois répétée à outrance, m’ont moins rejoint en tant que Québécoise.
  • Enfin, quelle douleur! Mais quel espoir aussi! La lecture de ce roman est nécessaire pour mieux comprendre les combats de la communauté LGBTQ2+ et pour devenir de meilleurs alliés ou alliées. Dans le cadre de mon travail, je me dois d’être ouverte d’esprit et de saisir les difficultés qu’éprouvent les groupes discriminés. Je pensais en savoir beaucoup, mais ce retour dans le passé m’a tellement appris! Connaître l’Histoire, c’est un outil qui nous permet de mieux construire l’avenir. Il y a encore tant à faire, mais j’ai de l’espoir. On ne peut plus retourner en arrière maintenant. Trop a été dit, trop a été fait. Et ce livre ne mourra jamais.

MES CITATIONS FAVORITES

« Car Rasmus fait partie de ces gens très nombreux qui se voient obligés de recommencer à zéro, de tirer un trait et de prendre un nouveau départ. Laisser le passé disparaître dans le brouillard et cesser d’exister. Comme une brume matinale qui s’évapore dès que le soleil se met à luire. » (p. 50)

« L’amour humain peut prendre de nombreuses expressions. Il peut être violent et passionnel. Il peut être tranquille et modeste. Il peut être jubilatoire et tragique. Il peut être angoisse et souffrance. Il peut être pathétique et même un peu ridicule. Mais il y a une chose qu’il ne peut jamais être. Il ne peut jamais être honteux. » (p. 87-88)

« Est-ce de la timidité ou de la lâcheté, ce comportement qui consiste à n’être jamais celui qui choisit mais celui qui est choisi (ou qui n’est pas choisi)? De ne jamais dire non. D’être toujours plein de gratitude. » (p.247)

« – Des livres qu’il n’aura pas le temps de lire. Des disques qu’il n’aura pas le temps d’écouter. Des vêtements qu’il n’aura pas le temps de porter. C’est comme ça.

Ça aussi ils sont forcés de l’admettre. Des cadeaux qui ne seront jamais ouverts. » (p.746)

MA NOTE (/5)

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2 Replies to “N’essuie jamais de larmes sans gants – Jonas Gardell”

  1. Mon dieu que tu écris bien, tu as une excellente plume. Tu ferais une très bonne critique littéraire, soit dans une revue ou un journal quelconque.

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